Interview Venantino Venantini
Anecdotes des Tontons flingueurs
Cinquante-trois ans après avoir joué Pascal, Venantino Venantini se souvient, depuis Rome, des Tontons flingueurs.
Dans votre livre de souvenirs (Le Dernier des Tontons flingueurs - Michel Lafon), vous dites que vous ne saviez pas, en allant tourner, si ce serait un nanar ou un chef-d'oeuvre...
Pas seulement moi, Lino Ventura ne voulait pas tourner ce film. Il n'était pas très emballé, il voulait garder son image d'homme sérieux, respectable, à la Gabin, dont il voulait être le successeur. Et puis, doucement, il s'est pris au jeu avec les dialogues de Michel Audiard et le réalisateur Georges Lautner.
Était-ce votre premier film en France ?
C'était mon premier long métrage. [L'acteur venait de jouer un vampire dans un court métrage français intitulé Fantasmagorie, ndlr.] C'est mon agent qui m'a envoyé. J'avais aussi besoin d'argent... C'était une grande époque de coproductions franco-italiennes. Même si je suis venu quelques années plus tôt à Paris étudier la peinture à l'École des beaux-arts, je parlais mal le français et on m'a fait doubler par un Yougoslave.
Au cours du tournage, êtes-vous devenus une vraie bande?
Chacun était soi-même, mais on faisait tous UN, c'est ça qui était formidable. Audiard était là sans arrêt, il s'amusait lui aussi. Lautner, c'était un bijou de metteur en scène. Sa gentillesse, sa douceur et sa tranquillité prouvaient sa maîtrise. C'était le capitaine de cette équipe de fous. On rigolait tous les jours. On parlait beaucoup de bouffe avec Lino, qui était d'origine italienne et avec qui je m'entendais très bien. Bernard Blier s'interposait entre nous pour savoir de quoi on parlait. Il y avait sans cesse des blagues et des calembours, c'était très drôle.
Connaissiez-vous les autres Tontons ?
Non, j'ai découvert Francis Blanche, qui était formidable. Il était très amoureux d'une fille italienne qui habitait à Rome, alors il m'en parlait tout le temps. Il était toujours très emballé par les filles. L'autre qui me faisait mourir de rire était Jean Lefebvre, avec son visage impossible. Il claquait beaucoup de pognon au jeu...
Avez-vous été surpris ensuite du succès de ce film devenu culte ?
Il y a quelques années, j'ai été invité à Lyon avec mon ami regretté Georges Lautner pour une projection spéciale dans les arènes. Quel triomphe! Tout le monde connaissait les répliques par coeur. On ne s'attendait pas à ça. Je n'ai jamais vu ça de ma vie. Les gens nous jetaient des coussins, des fleurs.... Incroyable! Une hystérie collective! Georges avait la larme aux yeux. Et puis, un papa m'a montré à sa jeune fille: «C'est lui, le tonton»! Comme s'il avait vu Jésus-Christ...
Vous êtes à l'affiche de Marseille, le film de Kad Merad...
Il me voulait absolument, parce que lui aussi est fan des Tontons flingueurs! Dans son film, je joue son père, qui a perdu la mémoire. C'est drôle, mais ce n'est pas qu'un film comique, c'est une histoire très touchante, mélancolique.
Source : Propos recueillis par Jean-Marc Barenghi
pour le Figaro
Les dialogues de Michel Audiard
pour la scène de la cuisine
Anecdotes des Tontons flingueurs
Maître Folace
Jean Volfoni
Raoul Volfoni
Fernand Naudin
Maître Folace
- Charmante soirée, n'est ce pas ? Vous savez combien ça va nous coûter ? 2 000 francs nouveaux. Fernand Naudin
- Y'en a qui gaspillent, et y'en a d'autres qui collectent ... Hein? Jean
- Faudrait encore des sandwichs à la purée d'anchois, ils partentbien ceux-là. Fernand Naudin
- Voilà vos encaissements en retard ... Les Volfoni ont essayé deme flinguer, oui Maître ! Maître Folace
- C'est pourtant pas leur genre ! Fernand Naudin
- Et ben ça prouve qu'ils ont changé de genre. Voilà ! Jean
- Quand ça change, ça change. Faut jamais se laisser démonter ! Maître Folace
- Vous croyez qu'ils oseraient venir ici ? Fernand Naudin
- Les cons ça ose tout ! C'est même à ça qu'on les reconnaît.
Les Volfoni sonnent à la porte... et entrent.
Paul Volfoni
- Sûr que tu t'es pas gouré de crèche ? Raoul Volfoni
- J'me goure jamais ! Une jeune fille
- A drink, please ? Raoul Volfoni
- J'veux rien ! Si c'est notre fric qu'y sont en train d'arroser, ça va saigner... Raoul Volfoni
- Dis donc mon brave Jean
- Monsieur ? Raoul Volfoni
- Il est là vot' patron ?. Jean
- Qui demandez-vous ? Paul Volfoni
- Monsieur Fernand Naudin. Raoul Volfoni
- Monsieur Fernand... Fernand l'emmerdeur ! Fernand le malhonnete ! c'est comme ça que j'l'appelle moi ! Jean
- Si ces messieurs veulent bien me suivre... Raoul Volfoni
- Et comment ! Alors tu viens, dis ! Jean
- Si vous voulez bien vous donnez la peine d'entrer.
Dans la cuisine... Raoul Volfoni
- Bougez pas !... Les mains sur la table ! Je vous préviens qu'on a la puissance de feu d'un croiseur, et des flingues de concours. Jean
- Si ces messieurs veulent bien me les confier... Raoul Volfoni
- Quoi ?
... (Patricia entre)
Jean
- Allons vite messieurs ! quelqu'un pourrait venir, on pourrait se méprendre et on jaserait... Nous venons déjà de frôler l'incident. Fernand Naudin
- Tu sais ce que je devrais faire... rien que pour le principe Raoul Volfoni
- Tu trouves pas qu'c'est un peu rapproché ? Paul Volfoni
- J'te disais que cette démarche ne s'imposait pas. Aujourd'hui, les diplomates prendraient plûtot le pas sur les hommes d'action. L'époque serait aux tables rondes et à la détente. hein ? Qu'est-ce que t'en penses ? Fernand Naudin
- J'dis pas non. Raoul Volfoni
- Mais dis-donc, on est tout de même pas venu pour beurrer les sandwichs ! Paul Volfoni
- Pourquoi pas ! au contraire, les tâches ménagères ne sont pas sans noblesses ; surtout parcequ'elles constituent le pas vers des négociations fructueuses. hein ? ... merci. Fernand Naudin
- Maître Folace, vous devriez planquer les motifs de fâcher ! Paul Volfoni
- Oh ! Monsieur Fernand... Fernand Naudin
- Y connaît la vie Monsieur Paul. Mais pour en r'venir au travail manuel, là, c'que vous disiez est finement observé et puis, ça reste une base. Raoul Volfoni
- Et bah c'est bien vrai. Si on rigolait plus souvent, on aurait moins la tête aux bétises. ... (Une jeune fille vient chercher du whisky et touche à l'argent) Maître Folace
- Touche pas au grisby... salope !!!! .... Paul Volfoni
- L'alcool à cet âge là... enfin ! Fernand Naudin
- Non mais c'est un scandale ! Raoul Volfoni
- Nous par contre on est des adultes,.. on pourrait peut être s'en faire un ptit ! Fernand Naudin
- Maître Folace ? Maître Folace
- Seulement le tout venant a été piraté par les mômes. Qu'est ce qu'on se fait,... on se risque sur le bizarre ? ça va rajeunir personne ! Raoul Volfoni
-Ah nous v'là sauvés !
Maître Folace
-Sauvés... faut voir ! Jean
-Tiens, vous avez sorti le vitriol ! Paul Volfoni
- Pourquoi vous dites ça ? Il a l'air pourtant honnête ! Fernand Naudin
- Sans être franchement malhonnête, au premier abord, comme ça il a l'air assez curieux. Maître Folace
- Y date du mexicain, du temps des grandes heures, seulement on a dû arrêter la fabrication : y a des clients qui devenaient aveugles, alors ça faisait des histoires... Raoul Volfoni
-Faut reconnaître, c'est du brutal ! Paul Volfoni
-Vous avez raison il est curieux ! Fernand Naudin
- J'ai connu une polonaise qu'en prenais au p'tit déjeuner...
Faut quand même admettre que c'est plutôt une boisson d'homme. Raoul Volfoni
- Tu sais pas ce qu'il me rappelle, c't espèce de drôlerie qu'on buvait dans une p'tite taule de Biénoa pas très loin de Saigon... Les volets rouges ... et la taulière, une blonde comaque... Comment qu'elle s'appelait Nom de Dieu ? Fernand Naudin
- Lulu la Nantaise ! Raoul Volfoni
- T'as connu !?
Raoul Volfoni
- Et c'est devant chez elle que Lucien le Cheval s'est fait déssouder. Fernand Naudin
- Et par qui, hein ? Raoul Volfoni
- Bah v'la que j'ai plus ma tête !
Fernand Naudin
- Par Teddy de Montréal, un fondu qui travaillait qu'à la dynamite. Raoul Volfoni
-Toute une époque...
Maître Folace
- D'accord, d'accord, je dis pas qu'à la fin de la guerre, Jo le Trembleur, il avait pas un peu baissé ; mais n'empêche que pendant les années terribles, sous l'occup, il butait à tout va ! Il a quand même décimé toute une division de panzer ! ah. Raoul Volfoni
- Il était dans les chars ? Fernand Naudin
- Non ! Dans la limonade ! soit à ce qu'on t'dit !
Raoul Volfoni
- Mais j'ai pu ma tête ! j'ai pu ma... Maître Folace
- Il avait son secret le Jo... Raoul Volfoni
- c'est où ? Jean
- À droite, au fond du couloir.
Maître Folace
- Hé, Hé, Hé ! 50 kilos de patates, un sac de sciure de bois, il te sortait 25 litres de 3 étoiles à l'alambic. Un vrai magicien ce Jo. Et c'est pour ça que je me permets d'intimer l'ordre à certains salisseurs de mémoires de bien vouloir fermer leur claque-merde ! ah.
Paul Volfoni
- Vous avez beau dire, y'a pas seulement que de la pomme, y'a aut'chose. Ça serait pas dès fois de la betterave, hein ? Fernand Naudin
- Si, y'en a aussi. Fernand Naudin
-Je mangerai bien quelque chose de consistant, moi. Raoul Volfoni
- Dis donc, elle est maquée à un jaloux ta nièce ? Je faisais un brin de causette, le genre réservé, tu me connais : mousse et pampre, v'là tout à coup qu'un p'tit cave est venu me chercher ! Les gros mots et tout ! Fernand Naudin
- Quoi ! Monsieur Antoine ! Si j'peux lui faire franchir les portes, faut p't'être le faire passer au travers ! Jean
- J's'rai pas étonné qu'on ferme !
Plusieurs sources pour les dialogues de Michel Audiard :
http://csabas.free.fr/newsite/tontonf.htm
http://c.laloy.free.fr/prod/musicFR/html/paroles/tontonsflingueurs_cuisine.htm
"J'ai connu une polonaise qui en prenais au petit déjeuner.
Mais il faut tout de même admettre
que c'est une boisson d'homme."
(Lino Ventura dans le film "Les tontons Flingueurs")