La Renault Dauphine est une petite berline française, produite par Renault entre 1956 et 1967. Issue de la volonté de Renault de concevoir un modèle plus spacieux et moderne que la 4CV, la Dauphine s’impose rapidement comme l’une des voitures emblématiques de la France de l’après-guerre. À l’époque, elle incarne l’idée d’une voiture populaire, élégante, capable de transporter une famille tout en restant abordable.
Son succès ne se limite pas à l’Hexagone : la Dauphine se fait également connaître à l’international, notamment aux États-Unis, où elle sera un temps la voiture importée la plus vendue. Pourtant, derrière cette réussite commerciale initiale, des faiblesses techniques et une concurrence féroce limiteront sa longévité.
L’histoire complète de la Renault Dauphine
Contexte et conception (début des années 1950)
Après le succès de la 4CV, lancée en 1946, la Régie Nationale des Usines Renault souhaite proposer un véhicule plus habitable, mieux adapté à la croissance économique de la fin des années 1950, et au désir des familles d’accéder à une automobile plus confortable. Dès 1951, les études débutent. L’objectif est de créer une berline 4 portes plus élégante, plus rapide et offrant une meilleure habitabilité que la 4CV, sans exploser les coûts.
Le nom "Dauphine" est choisi pour symboliser la « fille » ou « héritière » de la 4CV, souvent appelée « Reine des petites voitures » à l’époque. Le prototype bénéficie d’une ligne arrondie, fluide, dessinée en interne avec l’appui du styliste italien Ghia. Le moteur, un petit 4 cylindres en ligne refroidi par eau, reste à l’arrière, comme sur la 4CV, afin de conserver un schéma mécanique connu et optimiser l’espace intérieur.
Lancement et succès initial (1956-1960)
Présentée officiellement le 6 mars 1956, la Dauphine connaît un accueil triomphal. Sa silhouette élégante, ses 4 vraies places, son coffre avant et son moteur arrière de 845 cm³ développant environ 27 ch (puis 30 ch), plaisent à une clientèle en plein essor économique. La voiture est simple, facile à conduire, relativement économe et offre une image de modernité pour l’époque.
En quelques années, la Dauphine devient l’une des voitures les plus vendues en France. Son succès s’étend jusqu’aux États-Unis, où elle est un temps considérée comme la voiture importée la plus populaire, devant même la Volkswagen Coccinelle pendant une courte période.
Diversification de la gamme et versions spéciales (fin des années 1950 - début des années 1960)
Pour entretenir l’attrait, Renault propose plusieurs variantes et améliorations. On voit apparaître la Dauphine Gordini (à partir de 1957), équipée d’un moteur plus puissant (entre 37 et 40 ch), développée en collaboration avec Amédée Gordini, préparateur réputé. Cette version plus nerveuse séduit les amateurs de conduite dynamique.
Par la suite, la Dauphine Ondine (lancée vers 1960) offre une finition plus soignée, une boîte à 4 vitesses (au lieu de 3 sur la Dauphine standard) et un équipement amélioré. Ces variantes donnent un coup de jeune à une voiture déjà bien implantée.
Déclin, critiques et concurrence (1960-1967)
Malgré son succès initial, la Dauphine pâtit de quelques défauts :
Tenue de route délicate sur chaussée glissante, en raison de son architecture à moteur arrière et du réglage du train arrière.
Sensibilité à la corrosion.
Freinage et performances devenant insuffisantes face à la montée en puissance de la concurrence.
L’arrivée de nouveaux modèles plus modernes (comme la Renault 8 en 1962), dotés de moteurs plus performants, d’un meilleur freinage, et surtout d’une conception plus adaptée aux exigences des années 1960, précipite le déclin de la Dauphine. La production s’arrête définitivement en 1967, après plus de 2 millions d’exemplaires construits. La Dauphine aura marqué son époque, symbolisant l’accession à la voiture "de tous les jours" pour la classe moyenne française.
Les modèles les plus recherchés par année et les plus chers
Sur le marché de la collection, la Renault Dauphine a gagné en intérêt au fil des années, notamment grâce à l’engouement pour les véhicules populaires des Trente Glorieuses. Les modèles les plus prisés sont :
Dauphine premières séries (1956-1957) :
Les premières années de production, avec leurs spécificités esthétiques et leurs petits détails distinctifs, intéressent les collectionneurs pour leur authenticité. Un exemplaire restauré dans sa configuration d’origine, sans corrosion et avec son moteur d’usine, peut atteindre des sommes non négligeables (plusieurs milliers d’euros, mais rarement au-delà de 10 000 euros selon l’état).
Dauphine Gordini (à partir de 1957) :
C’est la version la plus recherchée. Sa sportivité relative, sa rareté par rapport aux versions standard, et son nom légendaire attirent les amateurs. Les Gordini en état concours, avec une histoire limpide, peuvent dépasser les 10 000 à 15 000 euros, voire plus, selon leur état et la qualité de la restauration.
Dauphine Ondine (à partir de 1960) :
L’Ondine, avec son équipement plus cossu et sa boîte 4 vitesses, est également recherchée. Les collectionneurs apprécient son relative confort et sa différence de positionnement. Son prix peut s’approcher de celui d’une Gordini, sans toutefois souvent l’égaler.
Séries spéciales ou rares :
Certaines séries limitées, exemplaires de pré-série ou véhicules avec un historique particulier (par exemple une Dauphine ayant participé à des rallyes, ou propriété d’une personnalité) peuvent voir leur cote grimper.
En règle générale, la valeur d’une Dauphine dépend fortement de son état de conservation, de l’absence de rouille, de la qualité de la restauration et de l’authenticité de ses composants.
Avantages et inconvénients de la Renault Dauphine
Avantages :
Style et nostalgie : La Dauphine est typique de l’époque des années 1950-1960 en France, son look rétro et charmant fait partie de son attrait aujourd’hui.
Facilité de maintenance : Son moteur simple et robuste, ainsi que sa technologie relativement basique, rendent l’entretien accessible pour un passionné de mécaniques anciennes.
Pièces détachées encore disponibles : Grâce aux clubs et aux réseaux de passionnés, il est encore possible de trouver des pièces neuves ou refabriquées, facilitant la restauration.
Valeur patrimoniale : La Dauphine incarne un pan de l’histoire industrielle et sociale de la France, ce qui lui confère une aura historique recherchée par certains collectionneurs.
Inconvénients :
Rouille et corrosion : Comme de nombreux véhicules de cette époque, la Dauphine est très sensible à la corrosion. Trouver un exemplaire sain est un défi, et la restauration de la carrosserie peut être coûteuse.
Performances limitées : Le petit moteur et la conception d’origine rendent la Dauphine peu adaptée à la circulation moderne, notamment sur autoroute. Elle manque de puissance et de stabilité à vitesse élevée.
Tenue de route perfectible : La configuration à moteur arrière, la suspension et la répartition des masses peuvent rendre la voiture délicate à conduire en conditions difficiles, surtout sur routes humides.
Confort spartiate : Le confort est sommaire aux standards actuels, avec une suspension peu sophistiquée, une isolation phonique limitée et une ergonomie rudimentaire.
En somme, la Renault Dauphine est un témoignage de l’histoire automobile française, représentative du dynamisme économique et social des Trente Glorieuses. Aujourd’hui, elle séduit par son charme rétro, sa simplicité mécanique et l’intérêt patrimonial qu’elle suscite. Les exemplaires les plus rares, notamment les Gordini et les Ondine, sont très appréciés, tandis que les amateurs de classiques trouveront dans la Dauphine un modèle attachant, à condition d’accepter ses limites techniques et de prendre soin de sa carrosserie sensible à la corrosion.
Article par JM. Decayeux / PHOTOGRIFFON
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