Histoire complète de la Citroën SM
La Citroën SM est l’un des modèles les plus audacieux et les plus emblématiques de l’histoire automobile française. Présentée en 1970, elle incarne la volonté de Citroën de proposer une automobile de grand tourisme alliant raffinement, technologie de pointe, confort inégalé et performances élevées. La SM naît dans un contexte particulier, fruit de l’alliance éphémère entre Citroën et Maserati, et de l’ambition de créer une GT à la fois luxueuse et innovante, destinée à un marché haut de gamme et international.
Genèse et contexte (fin des années 1960) :
À la fin des années 1960, Citroën a déjà révolutionné le monde de l’automobile avec la Traction Avant, la DS et la 2CV. L’idée de concevoir une grande routière sportive, au-dessus de la DS, apparaît pour renforcer l’image de marque de Citroën sur le segment du haut de gamme. En 1968, Citroën rachète Maserati, marque italienne réputée pour ses moteurs performants, dans le but de doter son futur coupé d’un bloc noble, raffiné et puissant.
Le projet, initialement connu sous le nom « Projet S », aboutit à la SM (S pour « projet S », M pour Maserati).
Lancement (1970) :
La Citroën SM est présentée au Salon de Genève en mars 1970. Elle impressionne par sa ligne aérodynamique, dessinée par Robert Opron, à l’avant profilé et aux phares carénés (sur la version européenne, ils sont directionnels et asservis à la direction), et par l’arrière tronqué. Son design avant-gardiste, sa hauteur de caisse variable grâce à la suspension hydropneumatique, et son intérieur luxueux et confortable frappent les esprits.
Sous le capot, un moteur V6 Maserati (2,7 litres puis 3,0 litres) développe entre 170 et 180 ch, permettant une vitesse de pointe proche de 220 km/h, une performance remarquable pour l’époque. Le secret de la SM réside également dans sa direction assistée DIRAVI, un système asservi à la vitesse qui facilite les manœuvres et stabilise la trajectoire à haute vitesse, une première mondiale.
Évolutions et déclinaisons (1970-1975) :
Dès ses débuts, la SM suscite l’engouement des passionnés et des connaisseurs. Elle est produite à l’usine de Javel (Paris), puis à Aulnay-sous-Bois. Plusieurs évolutions ont lieu durant sa courte carrière :
En 1972, arrive une version à injection électronique (SM Injection) qui améliore la réponse à l’accélérateur et la consommation, ainsi qu’une version à carburateurs adaptée aux normes américaines (avec phares fixes et pare-chocs spécifiques).
Une version 3 litres (SM 3.0) est introduite, offrant un peu plus de couple et de souplesse.
L’équipement intérieur évolue légèrement, mais le concept reste inchangé.
Citroën envisagea d’autres déclinaisons, notamment un cabriolet, un break, ou encore des préparations spéciales (comme la SM Opéra carrossée par Chapron), mais la crise pétrolière de 1973 et les difficultés financières de Citroën sonnent le glas de ces ambitions.
La fin de la SM (1974-1975) :
La SM, malgré ses qualités, souffre d’un marché difficile pour les voitures de luxe à moteur gourmand en carburant, de l’éloignement des réseaux de maintenance capables d’entretenir ses spécificités techniques, et de la disparition de la marque Maserati du giron de Citroën (PSA rachète Citroën en 1974 et vend Maserati en 1975). La SM, symbole d’une époque d’audace, ne correspond plus aux priorités économiques du nouveau groupe.
La production cesse en 1975 après environ 12 920 exemplaires produits. Même s’il s’agit d’un échec commercial relatif, la SM laisse une empreinte indélébile, devenant au fil du temps un véritable collector.
Les modèles les plus recherchés et les plus chers par période :
1970-1972 (Premières séries, carburateurs) :
Les toutes premières SM, à carburateurs, avec les phares avant directionnels (inexistants sur les versions US), sont très appréciées pour leur authenticité. Ces modèles « européens » d’origine, non modifiés, en excellent état et avec historique limpide, sont déjà recherchés.
1972-1973 (SM Injection et SM 3.0) :
L’arrivée de l’injection électronique Bosch D-Jetronic et du moteur 3 litres est convoitée par les amateurs, car ces versions offrent un agrément de conduite supérieur. Les modèles 3 litres sont plus rares et donc particulièrement recherchés, notamment lorsqu’ils conservent leurs équipements spécifiques d’origine.
Modèles spéciaux et carrossés :
Les SM carrossées par Chapron (SM Mylord cabriolet, SM Opéra berline 4 portes) sont extrêmement rares et peuvent atteindre des prix très élevés sur le marché des collectionneurs.
Les versions destinées aux États-Unis, avec phares fixes, sont moins appréciées en Europe, mais leur rareté sur certains marchés peut aussi leur conférer de la valeur.
Les plus chers aujourd’hui :
Les SM les plus onéreuses sur le marché sont généralement :
Les exemplaires parfaitement restaurés ou préservés d’origine, affichant peu de kilomètres, avec un historique complet.
Les séries spéciales carrossées par Chapron (Mylord, Opéra), dont la valeur peut grimper à plusieurs centaines de milliers d’euros.
Les SM injection 3.0 en parfait état sont également parmi les plus chères et rares.
Avantages et inconvénients de la Citroën SM :
Avantages :
Design avant-gardiste et iconique : La SM est considérée comme l’une des plus belles voitures de son époque, avec des lignes fluides, aérodynamiques et élégantes.
Confort exceptionnel : Grâce à la suspension hydropneumatique, l’absorption des irrégularités de la route est remarquable. L’intérieur est cossu et silencieux, faisant de la SM une véritable GT de luxe.
Technologies innovantes : Direction Diravi à assistance asservie à la vitesse, freins assistés à sensibilité variable, phares directionnels (sur versions européennes), ces équipements étaient révolutionnaires et confèrent une expérience de conduite unique.
Performances intéressantes : Le V6 Maserati offre une puissance honorable, permettant des vitesses de croisière élevées et une véritable aisance sur autoroute.
Inconvénients :
Coûts d’entretien élevés : La SM est complexe, avec un moteur Maserati exigeant, une hydraulique sophistiquée, ce qui entraîne des frais de maintenance plus importants qu’une voiture classique.
Fiabilité variable : Certaines composantes, notamment le V6 Maserati, demandent un entretien rigoureux et régulier. De plus, les pièces spécifiques peuvent être difficiles à trouver et chères.
Consommation de carburant élevée : La SM, avec son moteur noble et son poids conséquent, consomme davantage que les standards modernes, ce qui était déjà un inconvénient dans les années 1970.
Réseau de spécialistes limité : Aujourd’hui, peu de garages sont capables d’entretenir correctement une SM, ce qui contraint souvent le propriétaire à s’adresser à des ateliers spécialisés.
En somme, la Citroën SM reste un jalon unique dans l’histoire de l’automobile française, alliant innovation, style, performance et confort. Sa rareté, ses coûts d’entretien et sa complexité technique en font une voiture d’exception, prisée des collectionneurs passionnés en quête d’un modèle mythique, reflet d’une époque de créativité automobile sans compromis.
Article par JM. Decayeux / PHOTOGRIFFON
|