Histoire complète de la Citroën DS
Contexte et genèse (première moitié des années 1950)
Au début des années 1950, Citroën cherche à remplacer sa vieillissante Traction Avant, modèle révolutionnaire en son temps mais devenu daté après la Seconde Guerre mondiale. La marque vise un renouveau technologique, esthétique et symbolique. Sous la direction de l’ingénieur André Lefèbvre et du styliste italien Flaminio Bertoni, Citroën prépare un modèle totalement inédit. Le projet, d’abord connu sous le nom “VGD” (Voiture à Grande Diffusion), doit incarner la modernité et la haute technologie de l’automobile française.

Lancement au Salon de Paris (1955)
La Citroën DS est présentée le 6 octobre 1955 au Salon de l’automobile de Paris. Son impact est immédiat, voire spectaculaire. En une seule journée, Citroën enregistre 12 000 commandes, un record à l’époque. La DS, dont le nom évoque la “Déesse” (jeu de mots avec les lettres D et S), attire par sa ligne futuriste, son aérodynamisme exceptionnel, son poste de conduite ergonomique et surtout sa suspension hydropneumatique révolutionnaire. Cette dernière, associant confort, tenue de route et hauteur de caisse constante, marque un tournant dans l’histoire de l’automobile.

Évolution technique et stylistique (fin des années 1950 - 1960)
1956-1959 : Les premières DS, nommées DS19 (moteur 1.9L), rencontrent un succès certain mais souffrent parfois de problèmes de mise au point. Citroën améliore rapidement la fiabilité.
À partir de 1957 apparaît l’ID19, version plus “économique” et moins luxueuse de la DS, dépourvue de certaines raffinements mais bénéficiant du même confort.
Fin des années 1950 - début 1960 : Citroën apporte des perfectionnements esthétiques (phare arrière modifié, teintes variées), techniques (amélioration des moteurs, fiabilisation des circuits hydrauliques) et enrichit la gamme : Break (familiale), versions utilitaires, etc.
Années 1960 : l’âge d’or et diversification de la gamme

1962 : Introduction de la boîte hydraulique plus fiable.
1964-1967 : La DS évolue stylistiquement. En 1965, le moteur plus puissant DS21 (2.175 cm³) voit le jour. Les versions Pallas (luxe), Prestige (avec séparation chauffeur), Cabriolet (réalisé par Chapron) se multiplient.
1967 : La DS adopte les célèbres phares directionnels sous vitres carénées (sur DS21 Pallas), offrant une signature visuelle unique et améliorant la vision nocturne. Cette innovation, couplée à la suspension hydropneumatique, renforce l’image avant-gardiste de la voiture.
Années 1970 : perfectionnement et fin de carrière

1970 : Introduction de la DS21 à injection électronique (DS21 IE), puis en 1972 de la DS23 (2.3L), plus puissante et confortable.
La DS reste un symbole du design automobile pendant toute sa production, se distinguant dans les milieux diplomatiques, artistiques, et chez les grands notables.
1975 : Après 20 ans de carrière et plus de 1,45 million d’exemplaires produits, la production de la DS s’arrête en faveur de la Citroën CX. La DS aura durablement marqué l’histoire, devenant une icône du XXe siècle.
Modèles les plus recherchés par période et les plus chers
Années 1950 - premières séries :

Les premières DS19 (1955-1957), surtout celles datant de 1955, en état d’origine impeccable, sont très recherchées. Leur valeur provient de leur statut de premières versions d’un modèle révolutionnaire.
Les ID19 des premières années, plus rares dans un état irréprochable, peuvent également intéresser les collectionneurs souhaitant une DS plus simple à entretenir.
Années 1960 - diversification :

DS Cabriolet Chapron (1958-1973) : Les exemplaires signés Henri Chapron sont parmi les plus prestigieux et chers du marché. Produits en série très limitée et faits à la main, ils peuvent valoir plusieurs centaines de milliers d’euros selon leur état et leur provenance.
DS21 Pallas (à partir de 1965) : Les versions Pallas, offrant un niveau de finition supérieur (cuir, matériaux nobles, insonorisation renforcée), sont très recherchées, notamment celles pré-1967 encore “phares non carénés” et celles post-1967 avec phares directionnels.
DS Prestige (carrossée par Chapron également, berline haut de gamme avec séparation chauffeur) : Encore plus rares que les Pallas standard, ces versions commandées souvent par des diplomates sont très valorisées.
Années 1970 - fin de production :

DS21 IE et DS23 IE Pallas/Prestige (1970-1975) : Les versions à injection, plus puissantes et plus performantes, sont aujourd’hui très prisées. La DS23 IE Pallas, notamment, est considérée comme l’apogée technique et esthétique.
Les DS Break en état exceptionnel sont également recherchées par les amateurs de voitures familiales historiques.
Les plus chers sur le marché actuel :

DS Cabriolet Chapron d’origine : Ces modèles peuvent atteindre des prix très élevés (plusieurs centaines de milliers d’euros), selon état, authenticité et historique.
DS23 IE Pallas en état concours, avec phares directionnels, carnet d’entretien complet et historique limpide, peut dépasser facilement les 70 000 à 100 000 euros selon la rareté.
DS Prestige et certaines séries spéciales (Chapron Majesty, Lorraine, etc.) sont des pièces de collection rarissimes aux prix très élevés.

Avantages et inconvénients de la Citroën DS

Avantages :
Confort inégalé : La suspension hydropneumatique procure un moelleux et une stabilité sur route incomparables, encore remarquables aujourd’hui.
Design avant-gardiste : La ligne aérodynamique, le style intérieur ergonomique et futuriste, ainsi que les phares directionnels, confèrent à la DS une esthétique unique et intemporelle.
Tenue de route et sécurité active : La traction avant, associée à la suspension, permet une excellente tenue de route, tandis que les freins assistés (disques à l’avant), l’éclairage performant et la répartition des masses offrent une conduite rassurante.
Technologie avancée pour l’époque : Injection électronique (sur certains modèles), direction assistée, boîte semi-automatique hydraulique : autant d’innovations qui ont fait de la DS une voiture très en avance sur son temps.

Inconvénients :
Complexité technique et coûts d’entretien : Le système hydropneumatique, les pièces spécifiques et la rareté de certains composants rendent l’entretien et la restauration coûteux et exigeants en connaissances spécialisées.
Fiabilité des premières versions : Les modèles des premières années pouvaient souffrir de problèmes hydrauliques et électriques. Bien que cela soit souvent résolu sur les véhicules restaurés, c’est un point historique à retenir.
Consommation élevée : Les moteurs, de conception ancienne, consomment plus que les véhicules modernes, ce qui peut être un frein à un usage régulier.
Corrosion et usure du temps : Comme beaucoup de voitures de cette époque, la DS peut souffrir de la rouille, notamment sur le châssis et les éléments de carrosserie, nécessitant une vigilance continue.

En conclusion, la Citroën DS est l’une des automobiles les plus emblématiques du XXe siècle, incarnant l’innovation, le raffinement et l’audace technologique. Son confort, son design, ses solutions techniques la rendent culte parmi les collectionneurs. Les modèles les plus rares, comme les Cabriolets Chapron ou les DS23 IE Pallas, atteignent des cotes très élevées. Toutefois, la complexité mécanique et l’entretien pointilleux constituent des limites à son utilisation quotidienne. La DS demeure un monument de l’histoire de l’automobile, symbole du génie français au milieu du siècle dernier.

Article par JM. Decayeux / PHOTOGRIFFON