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Editions PARIGRAMME
Souvenirs de Paris


Certains ont accroché la lumière d'une époque, d'autres ses ombres puis ils ont disparu.
Que reste-t-il des hauts lieux parisiens quand le manteau de la banalité les a recouverts ?
Rien ou bien peu, sinon quelques évocations littéraires ou historiques... et une adresse.

C'est ainsi que nous nous retrouvons aujourd'hui devant une agence bancaire en songeant
aux amours tumultueuses de Verlaine et Rimbaud, en face d'un magasin de souvenirs à guetter
la silhouette chapeautée d'Aristide Bruant, le nez collé à la vitrine d'une antenne Pôle emploi pour
nous assurer que Maurice Chevalier, Edith Piaf, Fernandel, Bourvil et Charles Ttrenet ne sont
pas de passage. D'un haut lieu à l'autre, c'est le privilège de Paris : on n'est jamais seul très longtemps !


Ce livre est disponible dans la plupart des bonnes librairies de France
et également disponible auprès de l'Editeur, en bas de page.


Some hung the light of day, other then its shadows they disappeared.
What is left for Paris attractions when the coat has covered the banality?
Little or nothing, except some literary or historical evocations ... and address.

Thus we find ourselves today in a bank thinking
raging love of Verlaine and Rimbaud, in front of a souvenir shop to watch
silhouette headed Aristide Bruant, nose pressed to the window of a pole antenna for use
ensure that Maurice Chevalier, Edith Piaf, Fernandel Bourvil and Charles are Ttrenet
no passage. On top place to another, it is the privilege of Paris: one is never alone for long!



ATTENTION - CES PHOTOS SONT SOUS COPYRIGHTS RESPECTIFS A LEURS AUTEURS.
CES PHOTOS SONT TOTALEMENT INTERDITES A LA VENTE ET N'ONT AUCUN LIEN
COMMUN AVEC MES PHOTOS GRATUITES. ELLES SONT ICI UNIQUEMENT POUR PRESENTER
LE TALENT DE LA (DES) PERSONNE (S) AU MONDE A LA FACON D'UNE ENCYCLOPEDIE.

SOUVENIRS DE PARIS
Hauts lieux disparus - Ce qu'ils étaient... Ce qui les a remplacés.

(COUVERTURE) -
Le Chat Noir. (anciennement rue de Laval) -
12 rue Victor-Massé © Giraudon / The Bridgeman Art Library


Trop à l'étroit dans les murs du boulevard de Rochechouart (voir p. XX) et fuyant les voyous qui entendent
y élire domicile, Rodolphe Salis établit son cabaret en mai 1885 dans une petite rue tranquille des environs.
Il y investit un hôtel particulier dont il entreprend de décorer spectaculairement la façade : un énorme chat noir
se détache sur un soleil rayonnant, encadré par deux lanternes ouvragées, tandis que l'enseigne historique d'Adolphe
Willette trouve sa place près de la porte et que des cascades de lierre tapissent les murs. À l'intérieur, le décor est
tout aussi exubérant, véritable bric-à-brac fantastico-historique, ponctué par les œuvres de Willette, de Caran d'Ache
ou de Steinlen. Au rez-de-chaussée, on s'alcoolise et on s'échauffe consciencieusement, au 1er, on assiste aux
spectacles des chansonniers et, au 2e, on peut goûter les représentations du théâtre d'ombres colorées, ancêtre du
cinéma, créé par Henri Rivière au moyen de silhouettes en zinc. Les pièces de Caran d'Ache, de Rivière et de
Somm pour ce petit théâtre animé constituent la principale attraction du nouveau Chat Noir, avec les chansonniers ;
ces derniers cultivent un esprit vif, gouailleur, brocardant sans relâche puissants et institutions.
Tout passe, tout lasse… Le dernier spectacle du théâtre d'ombres est donné en 1896, le public se fait plus rare,
le bail tire à sa fin. Rodolphe Salis meurt en 1897 ; le Chat Noir n'est plus, en dépit d'une tentative de reprise
sur le boulevard de Clichy qui fait long feu.





CONCERT MAYOL
10, rue de l'Echiquier, 10
ème


L'établissement naît sous l'enseigne du Concert Parisien dans les années 1880 mais connaît son âge d'or quand Félix Mayol, inoubliable créateur de Viens poupoule (« Viens poupoule, viens / Quand j'entends des chansons / Ça me rend tout polisson… »),
le rachète en 1909 et en prend la direction. Il y fait découvrir aux Parisiens ses jeunes compatriotes toulonnais, Félicien Tramel, Valentin Sardou, Raimu… Après avoir conquis Marseille, ceux qu'on surnomme vite les « comiques à l'huile » emballent Paris.
C'est aussi sur cette scène que Maurice Chevalier se lance au-delà des frontières de « Ménilmuche ».
Mayol cède son affaire en 1914 ; le Concert continue. Sur une scène exiguë, on accueille des « ensembles de femmes nues »
ou une « revue à grand spectacle », comme aux Folies-Bergère ou au Casino de Paris mais dans une ambiance plus populaire,
plus gouailleuse, plus vivante. Car ici, on n'oublie pas qu'il n'y a de soirée réussie qu'avec des mots qui font mouche et des
chansons qui font rire. Entre les poitrines exhibées et les gambettes agitées, ce sont les ministres et les parlementaires
qui sont à la fête : « Je regarde, clame une donzelle dévêtue, le faubourg populaire, le faubourg laborieux au grand cœur.
Dans mon dos, j'ai la Chambre. C'que je suis contente, à elle, de lui montrer mon cul ! »
La formule plaît, prospère, se développe. Après la Seconde
Guerre mondiale, la chair se fait plus triste qui s'illustre dans des strip-teases sans esprit. Le Concert Mayol ferme ses portes en 1976 ; il n'en reste que le fronton aux deux angelots qui encadraient le portrait – disparu – du maître des lieux.




A LA PLACE DU CONCERT MAYOL actuellement



LE DINGO BAR
10, rue Delambre, 14ème

En 1923, avant même la naissance du Select, son voisin du boulevard du Montparnasse, le Dingo attire tout ce que
Paris compte d'Américains. La lost generation en fait vite son quartier général. Sinclair Lewis, Ezra Pound, Henry Miller,
John Dos Passos… sont familiers des lieux, tandis qu'Ernest Hemingway y fait la connaissance de Francis Scott Fitzgerald
en avril 1925. Épisode rapporté dans Paris est une fête : « Scott était un homme qui ressemblait alors à un petit garçon
avec un visage mi-beau mi-joli. Il avait des cheveux très blonds et bouclés, un grand front, un regard vif et cordial et
une bouche délicate aux lèvres allongées, typiquement irlandaise, qui, dans un visage de fille, aurait été la bouche
d'une beauté » ; mais, note cruellement Hemingway, « il avait des jambes très courtes. Avec des jambes normales,
il aurait peut-être été plus grand de cinq centimètres ».
Débute une amitié chahutée, complexe, teintée d'admiration réciproque, de rivalités, de détestations. Fitzgerald est
déjà un écrivain célèbre ; il aide Hemingway à publier son premier roman… ce que celui-ci aura finalement beaucoup
de mal à lui pardonner.




A LA PLACE DU DINGO BAR actuellement



LE PALAIS DU TROCADERO vers 1890
11, place du Ttrocadéro et du 11 novembre, 16ème



Le souffle de l'inspiration – tout au moins architecturale – semble ne jamais avoir faibli sur la colline de Chaillot.
C'est là que Napoléon projette d'élever le palais du roi de Rome pour son fils et d'établir un complexe administratif
enfermant les archives de l'Empire ; c'est là encore qu'on envisage, sous la monarchie de Juillet, d'installer
le tombeau de l'Empereur, puis, en 1868, une statue de La France intelligente éclairant le monde comme une
anticipation de la statue de la Liberté.
Mais c'est en vue de l'Exposition universelle de 1878 qu'on bâtit réellement. S'élève alors un palais tourmenté,
dans un style néo-mauresque, dont la partie centrale est encadrée par deux minarets et flanquée de deux ailes
courbes. Cette œuvre de Gabriel Davioud, grand collaborateur d'Haussmann, n'est pas destinée à survivre à l'Exposition…
mais demeure cependant. Signal immanquable dans le ciel de Paris, le Trocadéro suggère chez ses contemporains
des comparaisons aussi flatteuses que celles d'un « crabe ouvrant ses pinces » ou d'une « mouche posée
sur une soupière » ! Aussi, personne ne manifeste une grande affliction quand la décision est prise de le détruire
pour lui substituer un bâtiment plus au goût du jour à l'occasion de l'Exposition de 1937. Il faut faire vite, à l'économie…
et considérer qu'un voisin de taille est apparu depuis la construction du vieux Trocadéro. L'idée géniale du trio
d'architectes – Jacques Carlu, Léon Azéma, Louis-Hippolyte Boileau – en charge des opérations est de ne pas chercher
à lutter contre la tour Eiffel, sur l'autre rive, en lui opposant un édifice nécessairement plus petit et plus lourd.
C'est par le vide que ces judokas de l'architecture répondent : ils aménagent une vaste esplanade centrale et gardent
les ailes semi-circulaires pour les habiller à la mode néoclassique. En même temps qu'ils offrent un point de mire
sur le monument-symbole de Paris, ils l'absorbent habilement dans leur propre composition.




LE PALAIS DU TROCADERO actuellement




LE MAQUIS DE MONTMARTRE
Avennue Junot, impasse Girardon,
18ème.

Sur le versant nord de la butte, s'étend ce qu'on appelle le maquis de Montmartre, coincé entre les rues Caulaincourt,
Lepic et Girardon. Cet espace correspond aux vestiges du parc du château des Brouillards, vaste propriété vaguement
lotie au milieu du xixe siècle.
Dans les années 1890, y afflue une population mélangée de chiffonniers, de ferrailleurs, d'ambulants, de marginaux
et d'artistes impécunieux qui n'est pas en mesure de payer un loyer dans les quartiers du centre. Des bicoques de
fortune, parfois des maisonnettes plus élaborées, poussent donc comme des champignons dans un environnement
encore empreint de ruralité. Steinlen, Van Dongen, Poulbot et d'autres squattent le château des Brouillards à l'abandon,
tandis que Modigliani se contente d'une baraque misérable. « Le long de notre barricade, se souvient Jean Renoir
dont la famille réside jusqu'en 1897 allée des Brouillards, il y avait des rosiers retournés à l'état sauvage. Au-delà,
c'était le verger du père Griès, l'un des derniers cultivateurs du haut Montmartre. »
Le percement de l'avenue Junot en 1910-1912 et son lotissement après la Grande Guerre sonnent le glas du maquis ;
il n'en reste rien, à l'exception d'une modeste parcelle, dûment protégée et investie par les amateurs de pétanque.





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